L’occupation napoléonienne de Venise

Le role de Bédros Abessov,

Arménien du Karabagh

dans le sauvetage du Monastère de Saint-Lazare

 

 

Extraits de l’article dans la revue mensuelle PAZMAVEB de Venise, du 5 Mai 1921, du Père Minas Nourikhan :

« Napoléon Ier et les PP. Mekhitaristes arméniens de Venise ».

 

Depuis six ans, la République de Venise n’existait plus, le Souverain Pontife était en exil. La petite Congrégation n’avait pas même le nécessaire pour vivre, parce que ses épargnes placées à la Monnaie de la République, ne produisaient plus, comme au temps de la Sérénissime . Le royaume d’Italie, sous l’hégémonie de la France, ne montrait pas la même sympathie qua la République vénitienne.

Dans une circonstance si critique et si désolante, l’Abbe Akonz, esprit calme et éclairé, appela à Venise les Pères anciens et tint conseil. Il fut décidé de faire des démarches, auprès des autorités françaises à Rome, à Paris, à Milan et même à Constantinople, où était ambassadeur M. Ruddin. Le Père Mesrob Agatchrakian, chimiste très connu, nommé chevalier par le Sultan, Meritissimus par l’Empereur d’Autriche, et plus tard membre de l’Institut minier de Paris, fut envoyé à Paris. Le P. Mesrob devrait agir sur la Cour de Napoléon par des savants de sa connaissance.

  1. Gabriel Avedikian, vicaire général de la Congrégation fut envoyé à Rome ; il devait voir le Cardinal Fesch , oncle de l’Empereur, qui habitait a Civitavecchia, « Représentant, dit notre chroniqueur, du plus grand monarque de l’univers ».

Le Cardinal Fesch, connaissait déjà l’Abbé Akonz. Ce dernier lui avait été présenté en 1804, et le cardinal s’était vivement intéressé aux publications de l’Imprimerie mekhitarienne, surtout au sujet des ouvrages d’Eusebe de Césarée, de Philon le Juif et de divers Saints Pères. Il avait promis alors sa protection efficace pour la Congrégation arménienne. Et voici que l’occasion se présentait.

Le P. Avedikian remit un Memorandum, semblable à ceux que devaient présenter lee autres envoyés. Ce memorandum contenait les trois propositions suivantes :

 

  1. La Congrégation mekhitariste est établie à Venise, pour développer dans sa nation, en Orient, la religion catholique et les sciences.

 

  1. La Congrégation n’est pas mendiante, et ne se procure pas des ressources à Venise. Elle vit soutenue par ses co-nationaux en Orient, et du produit de la vente des livres qui sont envoyés partout jusqu’aux Indes. Son capital était place à la Monnaie de Venise, moyennant un intérêt de 26420 livres. Après la destruction de la République de Venise, l’Autriche n’a plus donné que 12670 livres, puis a réduit la rente à 800 livres par mois. Il est impossible de vivre ainsi. Nous supplions que les 26420 livres, nous soient versées de nouveau.

 

III. La Congrégation, étant de nationalité étrangère, devrait être déchargée de toutes les charges qui sont pour les religieux du pays, et jouir de toutes les exemptions obtenues en Orient par les Français et les Italiens.

A Paris et à Milan, ceux qui tremblaient pour la vie de la Congrégation, conseillaient, de ne pas mentionner dans la supplique la qualité de « religieux », et d’accentuer plutôt le rôle d’Académie scientifique, ou d’Institut d’Etudes pour l’Orient ; ainsi on avait l’espoir d’être épargné, comme en France l’avaient été, les PP. Lazaristes, les Frères des Ecoles chrétiennes, les Missionnaires d’Orient, les Sœurs de Charité, en tant qu’œuvres de Bienfaisance, humanitaires.

Cependant la Congrégation mekhitarienne, dans ce terrible moment de vie et de mort, ne voulut point renier son caractère monastique et religieux, qui travaille pour la FOI et pour la Science. C’est en ce sens que le Cardinal Fesch écrivit au vice-roi d’Italie, le Prince Eugène de Beauharnais, fils de Joséphine, la femme de Napoléon. Ce dernier avait une tendre affection pour le Prince, âme noble, bonne, très instruit, bienveillant pour tout le monde, influent par son beau-père. Le Prince, comme vice-roi d’Italie, siégeait à Milan. Ainsi la supplique des Pères mekhitaristes devait arriver entre ses mains.

La Congrégation avait délégué à la capitale de la Lombardie le P. Jean Zohrabian, personne très instruite, bien connue en Europe par sa publication de la Bible en arménien, avec les variantes des manuscrits, qui, avec son érudition, était un homme de grand tact. Mais toutes ses qualités appréciables n’auraient obtenu aucun résultat favorable, s’il n’avait trouvé de forts appuis auprès du Prince.

Le premier appui fut son élève pour la langue arménienne, l’Abbé Bréme, fils du Ministre de l’Intérieur d’Italie, qui reçut le P. Zohrabian à bras ouverts et le présenta à son père, lequel se chargea de remettre au ministre du Culte la demands de la Congrégation arménienne. Le second appui du P. Zohrabian fut un arménien : Bédros (Pierre) Abessov de Karabagh, province orientale de l’Arménie. A ce fils de notre patrie, nous devons la bienveillance et la sympathie du Prince Eugène envers la Congrégation. En mentionnant avec une profonde reconnaissance le noble Prince, nous déposons aussi sur la tombe de Bédros Abessov, en guise de couronne de fleurs, la description que fait de lui le P. Elie Tomadjian, le célèbre traducteur en arménien d’Homère, de Plutarque, de S. Jean Chrysostome et de Massillon.

La lettre était adressée au P. Baptiste Aucher, le théologien très connu, le 7 novembre 1806, et renfermait une lettre de Bédros à ses parents en Karabagh. La lettre devrait être remise par le moyen de nos missionnaires au Caucase. Le P. Elie dit que le père de Bédros s’appelle Abbés, qu’il est mort. La mère, fille de prêtre marié, s’appelle Hripsimé ; le frère : Boghos, ses sœurs Thoumar, Sali, Soria. Leur surnom est Hadem, de la province de Karabagh ; leur ville Choucha ou Chou Kala, le village Vraghne.

Mais laissons au P. Elie la description de la personne de Bédros : « II y a un jeune homme de Karabagh, chef de la garde du vice-roi, le Prince Eugène, fils de l’Empereur de France, très aimé et très estimé de lui. Il a vingt-deux ans, de même taille que son maître, svelte, large des épaules, fort, de haute stature plus grand de quelques doigts que notre Archevêque Abbé. Actif, éveille, beau, de caractère doux, aimable à tous, comme le louent les lettres arrivées de Paris. Il promet un grand avenir, très apprecié de son maitre, le vice-roi, qui lui fit cadeau d’un uniforme de la valeur de six mille francs milanais. Il est venu nous trouver plusieurs fois, accompagné de ses compagnons du Palais, et s’est lié avec nous d’une affection particulière. Il appelait notre couvent : « mon couvent », et faisait les éloges de notre Congrégation devant le vice-roi.

Ce dernier était venu à Venise pour inspecter les côtes de la mer et voir les forteresses contre l’Angleterre. Un jour (selon que Bédros même nous le raconta) il aurait dit au vice-roi : « Va visiter notre couvent. Les Pères seront très contents ». Il a tant de liberté pour parler ainsi à son maître. Et le vice-roi aurait répondu : « Qu’est-ce qu’il y a dans le couvent. » Et Bédros de retour. « Que voulez-vous ? C’est un joli couvent, propre, les personnes sont très bonnes. » Le vice-roi aurait répondu : « J’irai, j’irai. »

Par son intercession notre Abbé fut reçu en audience le jour de la Toussaint. et quoiqu’il ne put voir le vice-roi, retenu par des affaires urgentes au Palais, il reçut un message honorifique : Que demain le vice-roi viendrait le voir au couvent. Notre Abbé, au retour du Palais, amena au couvent M. Bédros, qui dîna avec nous.

Le lendemain nous attendions tous le vice-roi au matin, et voici qu’à dix heures françaises, arriva à la porte du convent une gondole décorée. Nous crûmes que le Prince était dans la gondole, il sortit en effet avec deux gardes en tenue magnifique, mais M. Bédros n’y était pas, parce que le vice-roi voulait être traité en inconnu. Il portait un habit de noble civil, et ne se fit pas connaitre ; il avait ordonné aux gondoliers et aux gardes de ne rien dire, comme nous l’avons su après. Et quoique inconnu, cependant dans ses manières, dans ses paroles il montrait une autorité, une tenue magnifique et toute royale. En même temps il montrait envers nous douceur et familiarité. Ainsi nous avons été convaincus que c’etait le vice-roi lui-même.

L’archevêque Abbé fut soudain averti, et tous, petits et grands entourèrent le vice-roi inconnu. Il vit tout, et il eut plaisir de tout. Il demanda plusieurs informations, mais toujours pour des choses relatives au couvent. Il ne parla pas des matières intéressantes, qu’il connaissait déjà. Il désira spontanément voir l’Imprimerie, il la vit et fut content. Il se promena dans le couvent pendant une heure sans s’asseoir. Il avait à son côté notre Archevêque, et il partit en remerciant et saluant tous les Pères, fort content de nous, comme il s’exprima dans la suite à M. Bédros. Celui-ci se hâta de venir le jour suivant, sans se soucier du vent affreux et de la pluie. Il salua l’Archevêque et nous tous, parce qu’il devait partir avec le vice-roi. Le prince n’avait pas averti M. Bédros de sa visite au convent, avant de venir. Mais après le retour au Palais il lui avait dit, qu’il retournait au couvent. Nous avons remercié M. Bédros, parce qu’il a été la cause de la visite du vice-roi.

« M. Bédros, baisa deux, trois fois la main de Sa Grandeur notre Abbé, salua tous au couvent, et partit en laissant son cœur dans le monastère. »

Il était impossible que cette grande sympathie du Prince ne produisit pas son effet. Il était évident qu’il obtiendrait de l’Empereur, son beau-père, une exception à la commune suppression en faveur des Pères Mekhitaristes. Le P. Zohrabian, arrivant à Milan, avait eu bruit de cet espoir et même de l’arrangement de la question financière.

A Paris, le P. Mesrob avait présenté une supplique à l’Empereur le 22 Avril ; il avait visité plusieurs personnages savants, qui agissaient sur de hauts fonctionnaires de la Cour. Le P. Mesrob, dans une de ses lettres, donne les informations suivantes sur les Arméniens de Paris : « Il se trouve à Paris des personnes de notre nation : M. Abro(*), M. Tcherpet(**), qui est interprète dans la bibliothèque, vingt trois mameluks arméniens(***), militaires venus d’Egypte, un officier nommé Chahine, qui se signala à la bataille d’Austerlitz et obtint des promotions. Un autre arménien s’appelle Rustem, il est valet de chambre de l’Empereur et très bien vu de lui, quoique d’une capacité intellectuelle limitée.(****) II y a un autre jeune homme, du nom de Bédros, chambellan du fils de l’Empereur, qui est roi d’Italie. On dit pour Bédros qu’il est très intelligent, et avec le temps, fera carrière. Aleko Seghpossian est un bon enfant, mais encore très jeune. M. Joseph Yelkendjian qui est venu de Vienne avec moi, est intelligent. »

…L’empereur Napoléon vint à Venise le 27 novembre 1807. L’Abbé Akonz demanda une audience « pour lui présenter. ses hommages. » Le 5 décembre, Rustem, le mameluk de l’Empereur, arménien, vint à St. Lazare et remit à l’Abbé le billet d’audience, écrit par Mgr Codronchi, archevêque de Ravenne, grand aumônier de Sa Majesté Impériale et Royale, où on lui annonçait, qu’il serait reçu le lendemain à 8h 1/2 par l’Empereur, et lui recommanda de ne pas manquer l’heure.

Qui connaît la vie et le caractère de Napoléon, doit savoir que ses audiences étaient courtes, tranchantes. Ainsi doit-il avoir été à l’égard de l’Abbé Akonz, quand il s’est présenté avec son vicaire général. L’Abbé présenta pendant l’audience une supplique, relativement aux questions déjà indiquées. Pourtant, il n’aura pas reçu une réponse décisive ou consolante, autrement il l’aurait mentionnée dans ses lettres aux Pères en Orient. Seulement dans une lettre au Père B. Aucher, il note que la supplique aurait pu être rédigée avec plus d’efficacité. Les mois qui s’écoulèrent de 1808 jusqu’en août 1810 furent tous inquiétants pour la Congrégation, quoique des encouragements. Confidentiels ne manquèrent pas de la part d’amis haut placés et de M. Bédros de Karabagh.

Cependant la Congrégation assistait tous les jours à la dispersion des autres Communautés de Venise, ou à leur transplantation dans des pays lointains. La Congrégation des Bénédictins Olivetains de l’ile de Sainte Hélène, en face de St. Lazare, avait disparu définitivement. Ces deux petites iles s’appelaient « les deux yeux, les deux perles de la Lacune. » Cette disparition chagrina beaucoup nos Pères. Mais ce qui les troubla fortement, ce fut le décret du 12 mai, qui supprimait tous les couvents. L’impression générale et douloureuse fut des plus navrantes, non seulement pour les religieux, mais aussi pour les âmes pieuses. On devait déposséder les monastères séculaires, les riches bibliothèques, enlever les manuscrits précieux, les ors et les étoffes des églises, les meubles artistiques. Tout devait être enregistré et transporté à la disposition du gouvernement. Tous étaient sécularisés, hommes et femmes.

Une grande agitation et un terrible effroi s’empara des Pères de St. Lazare. Je trouve noté dans le Journal privé d’un Père, que toute la Communauté, se changea de costume et prit des habits orientaux, avec le turban sur la tête, pour accentuer leur caractère étranger. Déjà dans les journaux arrivés d’Autriche, on notait parmi les monastères supprimés, celui aussi des « Pères Mekhitaristes de Venise », et on peut imaginer le grand désespoir et la désolation. On faisait tous les jours des prières publiques. Les Pères passaient la journée dans l’Eglise, en prières au St. Sauveur ou à la Sainte Vierge, ayant le St. Sacrement toujours exposé. On voulut tenter une dernière démarche à Milan, et l’on envoya de nouveau le P. Zohrabian au Prince Eugène, avec une nouvelle instance. Le susdit Père fit toutes les démarches possibles, mais dans sa lettre du 5 août il ne donnait aucun espoir de succès.

Seulement, il avait su de son ami Opizzoni, que la supplique de la Congrégation présentée au Prince Eugène, avait été remise à l’Empereur, « Humainement il ne reste plus rien à faire, ajoutait-il, ainsi j’ai fini ce que ma Congrégation m’avait ordonné, et il ne reste aucune raison de s’attarder ici, nous sauront vite ou tard le résultat de nos démarches, que Dieu nous bénisse ».Ainsi il ne restait plus rien à faire qu’à attendre, l’anxiété au cœur. Dans de telles conditions, on commença les jeunes préparatoires à la fête de la Nativité de la Ste Vierge, jour anniversaire pour la Congrégation, ce jour-là était celui où la Congrégation avait été fondée par l’Abbé Mekhitar. Et voici que le 4 septembre le Prince Eugène arrive à Venise, et M. Bedros de Karabagh se présente au couvent, porteur de deux copies d’un décret de Napoléon, signé le 17 août, déclarant que la Congrégation des Pères Mekhitaristes était maintenue.

La nouvelle se répandit dans le couvent comme la foudre. Soudain retentissent toutes les cloches de la tour de l’église. Tous les religieux se ruent dans les couloirs pour demander les nouvelles. La joie de tout le monde est indescriptible. On court à l’église, pour baiser l’autel de la Ste Vierge. On chante le « Te Deum » interrompu par les sanglots des anciens. J’ai eu le bonheur de connaître quelques Pères de l’ère napoléonienne, et après tant d’années, ils étaient toujours émus quand ils se rappelaient cet épisode, et la tenue superbe dans toute cette crise, de l’Abbé général Etienne, des comtes Akonz Kôver.

e veux citer ici un morceau de sa lettre, donnant la grande nouvelle au Père Supérieur de Constantinople : le célèbre historien P. Michel Tchiamtchian. « Enfin voilà le moment, demandé à Dieu par les prières et les larmes, voilà un autre miracle de l’Auguste Souveraine (la Ste Vierge) pour la Congrégation mekhitarienne de St. Lazare. Car, dans la suppression de tous les couvents d’Italie, seul notre couvent, dirigé par la Grande Reine, est sauvé, au grand étonnement de tout le monde. Comme notre Communauté a été fondée le 8 Septembre, et a été sauvée en Morée de la persécution turque, ainsi dans la préparation de la fête de la Nativité de la Vierge, le Décret du Grand Napoléon, annonçant le grand bonheur pour notre Institution, est arrivé par le moyen du vice-roi. Celui-ci, à peine eut-il reçu le Décret, avant d’en donner communication au Préfet, comme d’usage, poussé par la grande joie, on envoya immédiatement deux copies imprimées, par le moyen de son fidèle garde, notre Co national M. Bédros. Je ne peux pas exprimer le bonheur que nous éprouvâmes en le recevant, nos cœurs furent au comble de la joie. Le gouvernement fit afficher plusieurs copies, en plusieurs endroits remarquables de la ville, comme aussi sur plusieurs portes de notre couvent. »

L’Abbé Akonz se présenta immédiatement au noble Bienfaiteur, le Prince Eugène Beauharnais, auquel il déclara la profonde reconnaissance de la Congrégation.

Le lendemain, il écrivit des lettres de remerciement aux amis de Milan, qui avaient tant aidé près du vice-roi et en premier lieu à Monseigneur Don Lodovico Arborio de Brème.

La nouvelle de la libération de la suppression se répandit soudain partout, en Orient et en Occident et voilà que les lettres affluèrent de toute part. Les Pères missionnaires de Transylvanie dirent que le clergé en Hongrie jugeait incroyable une telle faveur, et s’était uni à eux pour chanter le « Te Deum ». Mêmes impressions chez d’autres missionnaires, d’autres amis. Les Pères de Constantinople se sont rendus en corps à l’ambassade française pour exprimer leur profonde reconnaissance.

Mais la faveur du Napoléon ne se limita pas au Décret. Le Consul de France était chargé de la part du gouvernement Impérial d’informer l’Abbé archevêque Akonz, que le couvent de St. Lazare considéré comme une Académie de savants, jouirait toujours de toute la bienveillance de I ’Empereur.

Ainsi la Congrégation sure de sa vie matérielle, put vaquer tranquillement à ses occupations religieuses et littéraires, et put donner au monde savant tant de travaux en diverses branches, qui sont exposés dans l’ouvrage du P. Basile Sarkissian : « L’Activité littéraire bicentenaire de la Congrégation arménienne mekhitariste de Venise.»

Source :

ttp://www.globalarmenianheritage-adic.fr/

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